—Dany, vous avez travaillé votre pitch dans le cadre du programme LevelPlus (ndla : atelier animé par l’autrice de ces lignes). Comment pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
— Ha, en effet ! (Il rit). Je suis un professionnel multi talents expert dans la gestion d’équipe, le « change management » et la transformation dans les grandes entreprises, les entités gouvernementales et les PME. Ma force est de visualiser les flux transversaux d’une entreprise. Cela me permet de faciliter tout ce qui constitue le management du changement ; je comprends les implications et en saisis les effets domino.
—C’est ce que l’on appelle l’effet papillon ?
—C’est cela. Je comprends comment un battement d’aile ici devient un ouragan à travers le monde. Dans mon métier il est important de maîtriser tous les facteurs et de réfléchir aux conséquences sur le reste. Je réfléchis avant d’agir pour faire en sorte de ne pas avoir à refaire une seconde fois ce que j’ai déjà fait une fois. La maturité fait que je réfléchis avant de courir.
—Cette maturité constitue-t-elle l’un des atouts que vous mettez en avant lorsque vous rencontrez le marché ?
— Tout à fait. Quand on gère des équipes, on voit qu’il y a des erreurs que certains juniors vont faire. Un collaborateur au contraire plus expérimenté ne va pas essayer de sécher la tâche qui est déjà sèche (Il rit). Un senior sait aussi comment faire pour que cela aille plus vite. L’expérience nous permet de prendre des raccourcis car on sait comment aller plus vite.
—Quels autres avantages voyez-vous à embaucher des profils comme le vôtre, quelles sont les qualités que devraient envisager les entreprises ?
—Le vécu. La densité de l’expérience vécue est un atout indéniable. Nous avons un bagage qu’un junior ne pourra jamais avoir. Il ne s’agit pas de nous opposer attention, mais bien de nous compléter. Les bonnes écoles sont bien, mais l’expérience ne peut pas être remplacée par l’éducation. Nous avons une certaine sagesse dans notre capacité de réflexion. Nous essayons de comprendre les stratégies, la politique en interne et les enjeux avant d’agir ou de bouger. Comme en sport, on essaie d’aligner tout le monde avant de courir. Mais c’est l’entrainement qui fait la différence !
—Vous parlez d’éducation. Un profil plus expérimenté peut aussi faire bénéficier l’entreprise de son savoir, transmettre ses compétences…
— Nous pouvons avoir une position de mentor ! Si l’entreprise est maligne, elle va voir qu’il y a du backup, des connaissances, des savoir-faire et du savoir-être. Les équipes ont aussi besoin de continuité : les personnes qui ont comme moi plus de 50 ans recherchent l’équilibre, la stabilité. Cela améliore la culture d’entreprise, j’en suis persuadé. A notre âge, on sait que les chiffres doivent être bons pour que notre job soit assuré. Un junior se projette plus difficilement aujourd’hui, il y a moins d’identification à l’employeur, encore plus depuis le covid et la recherche d’autres modalités de travail. Pour les plus âgés le contact reste important, comme le fait d’appartenir à une entité. C’est le « penser avec » au lieu du « penser pour moi ».
—Les entreprises pensent souvent que les seniors coûtent plus cher. Que leur dîtes-vous afin de changer ce paradigme ?
—Les retombées sont toujours supérieures car la stabilité coûte moins cher. On n’a pas besoin d’essai, on a un vécu, une efficacité naturelle, et la connaissance de l’intensité du travail de base. Cela permet à une personne expérimentée de prévenir et résoudre les problèmes avec intelligence, avec une forme de loyauté non négligeable.
—Que vous apporte le programme LevelPlus ?
— Énormément de choses. Ce programme nous permet de nous affûter, de nous éveiller et de nous poser les bonnes questions. LevelPlus nous apporte beaucoup d’outils, nous bénéficions de conseils de coachs et de workshops passionnants. Mais cela va aussi bien au-delà. Cela nous montre chaque jour comment approcher le marché, comment nous positionner. Moi qui suis resté 23 ans chez DELL en tant que directeur de la transformation digitale à l’international EMEA, je sais ce que c’est que d’avoir à se positionner tous les jours. Et c’est ce que nous faisons ici.
—Vous voulez dire que Levelplus permet aux talents de se positionner comme des collaborateurs ou des professionnels qui seraient déjà opérationnels auprès des recruteurs ?
—Oui, il y a une émulation d’idées qui amène plus loin. LevelPlus permet à beaucoup de rester alerte en termes d’intelligence collective. C’est bénéfique pour une entreprise qui recherche des talents immédiatement opérationnels car nous refléchissons à de nombreux enjeux professionnels de façon dynamique, en groupe et avec des experts. Nous avons une capacité de jugement, de recul et un fort esprit analytique. LevelPlus nous permet de prendre du recul sur les enjeux de recrutement, et nous prépare à l’étape d’après. J’irai même jusqu’à dire que c’est un programme qui devrait être confirmé et même obligatoire.
—Qu’est-ce qui pourrait faire bouger les lignes par rapport à l’âgisme ?
—C’est déjà en train de bouger et c’est très bien que cela soit pris au sérieux par l’Etat (ndla : LevelPlus est une mesure soutenue par le SECO et l’Etat de Genève). Il faut continuer et aller plus loin. Il faut rééquilibrer les enjeux au niveau des entreprises : renforcer la mixité et la diversité, et cela doit se traduire aussi en termes d’âge.
—Vous êtes un expert du « change management ». Peut-on faire changer de point de vue les entreprises sur les plus de 50 ans ?
—Comme partout, il ne peut y avoir d’acceptation globale si cela se fait au détriment d’autres personnes. Il faut qu’il y ait un alignement, de la transversalité. Le changement peut effrayer car les gens ont peur d’être mis à l’écart : il faut les impliquer, les faire participer au processus. Cela fait partie de la nature humaine : les gens n’aiment ni l’inconnu ni changement.
—Qu’est-ce qui vous motive, vous, dans un contexte professionnel ?
—Participer au développement futur de l’entreprise. Selon moi, qui ne bouge pas recule. Le statu quo fait reculer. Je n’aime pas la routine : avancer c’est innover, c’est trouver d’autres façons, d’autres voies, en respectant toujours l’humain. Et sans l’humain, l’entreprise n’est rien. Mon métier me passionne !
—Et en dehors du travail ?
—Ha, nous pourrions y passer des heures ! Pour ne citer que quelques-unes de mes passions, je suis moniteur bénévole de voile à Corsier. C’est aussi un acte social car il est important pour moi de pouvoir donner en retour de tout ce que je reçois. En hiver, je fais du ski, du snowboard, du ski de fond de nuit aussi ! Il règne une sorte de quiétude incroyable. Et puis j’aime la nature, depuis tout petit. J’ai passé dix ans à baguer les rapaces pour le Centre Ornithologique Suisse. Je fais aussi de la photographie animalière. Mais si vous me lancez, j’en parle des heures…
Et en effet, deux heures après nous voilà toujours là, à discuter avec Dany des castors de l’Arve, du milan noir, des rouge-queues à préserver ou encore des hôtels à chauve-souris que l’on peut installer dans son jardin. Tiens, là aussi il est question de flux transversaux et de comprendre comment un effet ici entraîne des conséquences là. Il recèle toujours une histoire à écouter et des compétences à bénéficier, derrière chaque talent. Et avec Dany, c’est une expérience unique.